Au Temple de la Main Noire

Le prêtre récemment arrivé, après être resté plusieurs journées entre naos du temple et entrée principale de la ville, sort par les lourdes portes renforcées de plaques de métal disposées de manière à solidariser les planches massives entre elles. Alors se plaçant devant celles-ci, et attendant qu'un regroupement de quelques personnes se masse devant, par curiosité, ou par crainte de rater quelque chose d'important, il s'exclame d'une voix claire et grave :

Aujourd'hui, travailleurs des champs, artisans, vous aurez pu constater un passage massif d'étrangers dans ces murs, dans l'enceinte même de cette Cité qui vous est chère, votre Mère civile. Des indolents qui au lieu d'accomplir une besogne respectable comme vous, une activité utile à notre société civilisée, courent et créent le désordre. Et qui plus est... ces gens, ces êtres, appartenaient à une race pas tout à fait monstrueuse, pas tout à fait humaine. Des semblants d'hommes, qui ne peuvent vous arriver à la cheville, car ils sont frêles comme vos épis de blé qui ploient sous les vents de l'est, ils ont des traits de femmes tout en arborant des attributs masculins, leur genre n'est qu'un mélange mal concocté par un alchimiste véreux. Des elfes, voilà le nom qu'on leur donne, mais appelons-les petite race, imparfaits, ou autres qualificatifs bien plus évocateurs !

Marquant une pause sous l'effet d'un violent coup de vent, amenant avec lui d'infimes gouttes de pluie venant fouetter les participants tout autant que l'orateur, Joriant profite du court moment de répit pour racler sa gorge afin de poursuivre le discours prenant de la force, ressemblant presque à une litanie haineuse dans sa façon de scander les phrases.

Oui, ce sont ces gens qui sont responsables des troubles que la ville a subi il y a peu, sol tremblant déracinant les jeunes arbres que vous avez planté pour vos fils, et je ne préfère pas parler des troubles dans ces catacombes déjà frappées d'un mal obscur. Ces êtres frivoles qui ignorent la vraie valeur du travail sont venus se pavaner devant vos filles, alors que vous étiez aux champs, au juste labeur, à ce qui fait de nous des êtres civilisés et non des sauvages.
Alors je vous le dis, ouailles du Seigneur des Ténèbres, méfiez-vous d'eux, dénoncez leur présence aux autorités, faites passer le mot à vos voisins, que les lavandières colportent la rumeur de leur présence au ruisseau, car c'est unis que nous éleverons le bouclier d'airain qui nous protégera de leur influence pernicieuse d'arriérés tout juste bons à vivre en ermites et se leurrant d'idées nébuleuses sur la vie.

Et si d'autres troubles surviennent, sachez que la Main Noire abattra son fléau divin sur toute menace venant gêner votre travail, votre dignité d'êtres humains. Soyez fiers de l'être, revendiquez-le, et gardez toujours à l'esprit que vous leur serez en tout point supérieurs.

Pour Baine, pour le Duc, pour Lomidar !

Ce faisant, il se retire sans mot dire, laissant les quelques personnes à leurs réflexions, à leur discussion, ouvrant avec efforts la lourde porte en tirant sur les anneaux de fer qui la scellent.

Le prêtre casqué afin de masquer son visage brûlé, rentre vers la Demeure du Fléau. Engoncé dans une armure terne, où trône désormais un trophée macabre constitué du scalp partiel d'un homme châtain, et à l'écu garni de piques maculé d'un sang visiblement récent sur sa face externe (sûrement une personne qui aura eu son visage écrasé contre celui-ci), il s'arrête devant l'écritoire, et y inscrit en lettres majuscules pour que les illettrés puissent déchiffrer vaguement :



Laissant alors quelques badauds indolents s'y intéresser, celui-ci tourne sa marche vers les portes massives renforcées, escortées des oriflammes quotidiennement entretenus par les novices lors de leurs tâches journalières. Puis il se met alors en quête de prière dévote devant l'autel du Fléau, tâchant d'attirer les faveurs de Baine sur son entreprise, devant le regard de l'Impercepteur Théodric Maine. Suivront une série de litanies visant à attirer l'échec sur les servants de Tyr et plus généralement de la Triade, dont Torm et sa rancoeur bien connue envers le Culte du Ténébreux.


(Hrp : Je ne suis pas disponible la semaine prochaine, mais ma boîte à mp est ouverte au besoin.)

Les cloches ont sonné au clocher du temple dit-on, de lourdes cloches au son grave et sinistre, en pleine soirée. Les portes fermées, les novices rappelés, tout cela laissait présager encore un obscur rite propre au Culte tyrannique, et pour cause, là était le signal de l'intronisation d'un nouveau membre dans le Clergé du Ténébreux. Une heure plus tard, la cérémonie fut terminée, les voeux prononcés et l'adepte adoubé au nom de Baine par ses zélés serviteurs.

Peu après, c'est une congrégation qui s'engouffra dans le Temple du Seigneur Noir, composée de plusieurs citoyens reconnus et surtout de gardes, chose relativement étonnante en soi... d'autant plus que ceux-ci escortaient le Chambellan de la Cité. Là encore, portes fermées, silence total des agents en poste devant l'édifice cultuel... Quand tout ce beau monde en ressortit, on raconta qu'un duel venait d'avoir lieu, un duel d'honneur, qui venait donc de se terminer par la mort d'une participante : June Von Rieshenback, membre d'une maison noble de la Cité. Les soins dus son rang, ainsi que motivés par son adoration de Baine lui seront accordés par une dernière messe en son honneur, ainsi que le voeu sincère que son âme combatte toujours dans la Forteresse des Landes Eternelles de Baine.