Coeur d'Erea

J'ai songé à tenir un journal afin d'y coucher mes pensées, ainsi que les événements qui ont marqués mon existence depuis mon arrivée sur le continent appelé Everneige.

Seulement, j'éprouve quelques difficultés à m'adonner à cet exercice qui autrefois me semblait par trop artificiel et dénué de spontanéité.
Mais j'avais tort.
A l'instar d'un grimoire j'aimerais y conserver certaines pensées avant qu'elles ne s'envolent loin de ma conscience afin de se perdre dans le néant.

Tu as toujours été le seul réceptacle de mes pensées égarées, aussi c'est à toi que s'adresse ces mémoires. Ces pages blanches sont à nous, à nous seuls.
Elles sont la vaste étendue de neige où s'inscrit l'empreinte de mes pas.

Je ne souhaites pas en faire un pathétique journal de jeune fille en fleur, triste et fade étalage de passions et d'émois puérils. Mais il se peut qu'il en soit ainsi, totalement.

J'ai peur d'écrire, peur de me retrouver seule face à une page désespérement blanche.
Peur de réaliser alors que mon existence est aussi vide que ces pages, vide de tout, même de toi.
N'est-il pas vrai que tu vis dans ma mémoire? On nous apprend que les êtres chers survivent à travers nous, par le biais du souvenir.
Qu'est-ce que celà fait de vivre à travers les souvenirs d'un autre? Tu détesterais celà... Et pourtant tu es le spectateur irréel de tous les instants de ma vie.

Ainsi commence ce chapitre d'une vie nouvelle.

Tu avais coutume de dire qu'un simple battement d'ailes, aussi infime que dérisoire peut changer le cours du temps.
Il est de ces rencontres qui changent une destinée...
J'avais le sentiment d'être un animal blessé, invisible au regard indifférent du monde et il m'a recueillie dans le creux de sa paume.

Il a fait voler en éclat la fragile muraille que j'avais bâtie autour de moi. Oh ! si tu l'avais vu ouvrir mon âme en deux pour m'obliger à voir, à dissiper le brouillard du savoir que je croyais posséder mais qui n'était rien d'autre qu'une brume insipide qui m'occultait la vérité.
Je me suis éveillée d'un long sommeil transi et j'ai soif, si tu savais ! Soif de connaissance, soif de compréhension.
J'aimerais m'abreuver à sa source, elle semble intarissable, elle semble profonde et splendide.
J'explorerais chaque recoin de son esprit, c'est une caverne fraîche, pleine de trésors merveilleux.

Pourquoi te le décrire? Tu le connais déjà.
Il trône dans mon ciel comme un astre flamboyant, à tes côtés.

J'attends chaque jour le moment où son regard croisera le mien, je cherche alors un moyen de le retenir près de moi.
Puis je l'écoute des heures durant, jamais rassasiée. Il a promis que jamais aucune interrogation ne demeurera sans réponse.
J'aimerais lui parler de toi mais j'ai peur que sa promesse prenne fin à ce moment là. Et s'il ne pouvait m'apporter d'explication au mystère de ton existence et de la soudaineté de ta disparition?
Quelle a été ta place dans l'Univers et quelle est-elle à présent?

Que deviennent ceux qui disparaissent?

La neige a fondue...
Oh... Je sais ce que tu penses ! Mais je n'y peux rien.
C'est ainsi et c'est plus fort que moi.

La neige a fondue et déjà les premiers bourgeons d'une saison nouvelle commencent à poindre dans le paysage vierge de mon coeur.
J'en sens les prémisces, je sens le parfum de sa peau chaque fois que je ferme les yeux.
Oserais-je jamais effleurer cette peau, même dans mes rêves les plus audacieux?
Est-il possible d'aimer sans rien demander? Est-il possible d'attendre éternellement un signe, un regard...?

Comment peut-on supporter pareil supplice?
L'attente est comme un vent glaçé qui lacère ma chair.
Le désir est comme un brasier incandescant qui la consume.
Je n'ai plus d'autre désir que sa présence et en son absence je me fais l'effet d'une poupée désarticulée, oubliée au fond d'un coffre poussiéreux !

Il m'a longuement parlé de l'équilibre des forces de l'Univers, mais comment trouver l'équilibre face à la passion?
J'aimerais l'interroger à ce sujet mais comment obtenir sa réponse sans réveler mes intentions?
L'idée que ces sentiments soient réciproques m'a hantée pendant des nuits et des jours et je me suis surprise à haïr toute femme sur qui il poserait son regard doré.

Si seulement je pouvais être comme vous et faire abstraction de ces sentiments qui me semblent ô combien injustes et déplacés...
D'où vient la jalousie? D'où tire t-elle son pouvoir?
L'être aimé peut-il nous appartenir tout entier, réellement?
Egoïsme et Amour sont-ils compatibles?

Quelle farce que tout ceci ! Invention créee par l'homme pour se détourner du droit chemin...

J'entends ton rire dans les tréfonds de mon esprit et comme tu as raison de rire !

La nature est mystère.
La nature est la mère indifférente dont chacun est issu et nous retournons tous à elle quand arrive la fin du chemin.
La nature est mystère et son mystère m'effraie.
La nature me permet de sentir dans son souffle ta présence fantasmée.

Un être est venu à moi à la faveur de la nuit. Un être mystérieux et effrayant.
On le compare à une bête parait-il, est-ce à cause de ce don qui lui permet de revêtir une apparence animale?
Il m'a rappelée Louve, cette femme étrange qui prétend vivre dans la nature au sein d'une meute de loup.
Peut-etre est-il de sa meute, peut-etre est-il son mâle...
La fascination m'a poussée à le suivre à l'orée de la forêt mais la sentinelle qui veille sur mes jours m'a empêchée de m'aventurer plus loin en compagnie de cet étranger.

Cependant je l'ai revu par la suite et nous avons converser, il fut de plaisante compagnie et je regrette de n'avoir rien pu partager avec lui.
Il a l'air d'affectionner les contes et les histoires étonnantes, les objets aussi... Un collectionneur peut-etre?
J'aimerais lui offrir un présent spécial afin qu'il partage encore avec moi ses secrets.
J'ignorais par exemple, que la nature abritait des esprits animaux capablent d'accorder leur bénédiction à qui sait leur rendre hommage.
Comment continuer à vivre sans en avoir aperçu un !?
L'idée que tu sois peut-etre un de ces esprits me console, si c'est le cas... Fais moi un signe !

Une question reste en suspend concernant ce personnage, Où commence l'homme et où s'arrête l'animal?
Laquelle de ces deux facettes décrit-il comme "la Bête" ?

Quand était-ce la première fois?

La première fois était-ce avec toi ou avec un autre ? Etions nous enfants ? Le monde s'est-il muré dans le silence ? Nos coeurs se sont-ils mit à battre à l'unisson ?

L'instant magique où deux souffles se rencontrent pour ne faire qu'un, je n'en ai pas souvenir de plus doux et de plus profond.

J'avais promis de t'épargner ce genre d'épanchements romantiques, mais qu'y puis-je au fond?
Mon coeur n'a pas changé de direction et il s'engage à présent sur une Voie dorée, la voie radieuse qui mène à la félicité éternelle.

Oh, tu peux rire ! Mon coeur est si grand et si plein que j'ai envie de déverser tout ce bonheur sur le monde.
Aucune de mes peurs n'a survécue à cette étreinte.

Ce matin, je me sens immense.

L'Ombre est parfois plus attirante que la Lumière.

La Nuit révèle parfois des visions plus claires que le Jour.

J'ai fait la connaissance d'un homme étonnant. Il a l'attitude et la noblesse d'un seigneur à qui tout réussit.
Si tu savais comme il m'exaspère !
Que ne puis-je le moucher et lui faire perdre de sa superbe.
Il ne doute de rien et surement pas de lui-même et de l'effet qu'il a sur autrui.

Parlons-en d'ailleurs...
Il s'adresse à moi avec la condescendance d'un adulte face à une gamine revêche. Il prétend tout connaître de moi et assurément ce à quoi mon coeur aspire.

S'il savait. Lui qui accepte et contrôle parfaitement ce pouvoir qui lui a été offert par la Nature.
Comment pourrait-il comprendre quelqu'un qui cherche à se défaire d'une malédiction ?

Même face à une page innoffensive je répugne à aborder ce sujet.
Ce que tous désignent comme un don m'apparait à moi comme un désastre, un malheureux incident de la nature, une punition...

Comment pourrais-je cautionner cette magie qui nous a fait tant de tort ?
Elle vibre en moi et aimerait sourdre par tous les pores de ma peau. A chaque émotion forte, à chaque émanation quelconque d'une quelconque magie, mon sang se consume et ma physionomie me trahit.
Il me suffit alors de penser à toi pour apaiser momentanément cette furie.
Il me suffit de penser à ton absence pour souhaiter que tout ceci disparaisse.
Mais ce voeu est insensé... C'est comme ce secret espoir de te retrouver un jour.

Il vient donc vers moi cet homme diabolique. Il m'entraine dans sa valse démoniaque ! Il me fait miroiter des promesses de puissance et de félicité ! Mais pour qui me prend t-il?
Je joue le jeu, je lui confie mes angoisses et accepte même de participer à un rituel qui aurait pour but de me "libérer" de ce pouvoir.

Oh je sais ce que tu penses.
Je suis incapable de résister à l'attrait du mystère, surtout lorsqu'il prend une forme si plaisante.
Je ne suis qu'une humaine après tout. Une simple et naïve humaine.

Et si le rituel marche c'est d'ailleurs tout ce que je serais dès lors. Une simple humaine sans histoire.
Et s'il échoue? Je sais que mon Astre veille sur moi...

Le pouvoir est un ruisseau. Il coule à travers mon corps pour irriguer chaque parcelle de ma chair, son courant est chaud, parfois tulmutueux.

Lorsque je ferme les yeux il me suffit de me plonger dans la méditation que mon aimé m'a enseignée pour le sentir aussi surement que je sens les battements de mon coeur.
Il avait raison, tous avaient raison. On ne peut renier éternellement ce qui fait partie intégrante de soi.

J'ai lutté pourtant.
Au plus fort de la tempête j'ai sentis quelque chose se rompre en moi, comme un verrou que l'on fait sauter, et la magie s'est déversée à torrents.
Grisante et horriffiante sensation de liberté.

Ô pouvoir mystérieux ! Emporte moi dans ton souffle puissant, libère moi ! Réduis mon âme en cendres !

Horrible pensée que d'être l'esclave de ce "don". Mon astre éternel à fait le serment de m'aider à contrôler ce pouvoir igné. Je ne sais pas si je m'en sens réellement capable mais le jeu en vaut la chandelle.
Et... Oh ne souris pas ! Tu sais à quoi je pense.
C'est un moyen de m'insinuer dans son univers, d'apprendre ce qu'il sait et de mieux comprendre de quoi est fait son corps toujours si impassible et paisible...

C'est la fureur qui a donné corps à ce pouvoir autrefois confiné en moi, et j'en éprouve de la honte même si l'ensorceleur m'affirme que cette violence qu'il m'a fait subir était nécessaire et justifiée.
L'orgueil m'empêche d'acceder à sa requête de faire de moi son apprentie, la peur aussi.
Néanmoins j'ai le sentiment de lui devoir beaucoup.
Sentiment renforcé par la conversation que j'ai eue il y a peu avec un être fantastique, un mage de guerre nommé Marlan.
A sa façon, il m'a été d'un grand secours, s'en doute t-il seulement?
Il décrit ceux de notre espèce comme des "Mages d'Instinct". J'aime ce terme qui me semble le plus approprié à notre condition.

Que dire sur ce chapitre de ma vie? Celà prend des airs de renaissance.
Serais-je un jour capable de controler quoique ce soit à la perfection ?
Serais-je jamais capable de me pardonner ce que je t'ai fait ?

Une chose me manque cruellement vois tu... Ta bénédiction.

Dans les ténèbres me parviennent l'écho de tes sanglots.
Détourne le regard, ne contemple pas les vestiges de mon être.

J'ai sentis ta présence, je l'ai sentie clairement alors que mes pas s'enfonçaient dans la forêt, elle n'avait rien d'inquiétante pourtant... Cette forêt.
Elle était même lumineuse et paisible, malgré l'obscurité. C'est une belle forêt.
Quel dommage que je n'y retourne jamais.

Les souvenirs affluent et se bousculent comme autant d'insectes rampants, désagréables.
Je ne veux pas me souvenir de la main de métal qui s'est refermée sur ma gorge, j'aimerais noyer ce cauchemar dans l'inconscience et l'oubli.

Tout semblait si paisible, si indifférent au drame. La nature est parfaite. Lorsque le gibier se fait dévorer par le chasseur rien ne vient troubler sa quiétude. C'est l'ordre des choses.

Les choses étaient belles d'ailleurs avant tout celà, avant que ce besoin irraisonné de rechercher le frisson de l'inconnu ne me mène à ma perte...

La honte me transperce aussi surement qu'une lame effilée.
Ai-je supplier pour ma misérable existence? Oui...
Ai-je abandonnée la lutte? Jamais...

Les ombres ont fondues sur moi, cruelles et malveillantes.
Moi qui les défiait toujours avec l'arrogance d'une lumière éclatante prête à recouvrir et jugguler l'obscurité.
Ils m'ont soufflée comme ont souffle une chandelle.
Je refuse de retranscrire les détails de cette lente agonie. Je refuse de souiller ces pages.

Vois-tu, la mort en elle-même n'est pas effrayante. Au contraire, elle est le berceau où l'âme cherche à se reposer.
Je ne l'ai pas souhaitée, je l'ai acceptée avec bonheur lorsqu'elle s'est profilée. Elle avait ton visage et le sien mêlés, elle irradiait dans les ténèbres, faisceau aveugle qui cherchait à m'atteindre.
Que ne puis-je te décrire sa beauté ? Elle a transcendée la souffrance, elle a apaisée mon âme à vif.
J'aurais pu m'y abandonner mais il est venu me chercher.
Avait-il entendu mon appel ? Le sang étouffait ma voix mais je sais que mon âme hurlait.
Avait-il senti le déclin d'une vie ? Mon corps n'était plus qu'une dépouille palpitante de souffrance.

Mon seul et unique désir était de le revoir et de l'étreindre encore...
La vie m'abandonnait, s'enfuyant dans le sang versé et je ne pensais qu'à lui, au parfum de sa chair et aux tendres moments que nous n'aurions jamais plus.
Un corps à l'agonie peut donc aspirer encore au frisson du plaisir...
Une âme presque éteinte peut donc rêver encore à la félicité...

N'as-tu jamais remarqué comme une fleur fânée dégage alors toute la puissance de son parfum lorsqu'on broie ses pétales entre nos doigts ?
Un être vivant brule t-il d'une flamme plus vive aux regards des dieux dans les derniers instants de sa vie ?

J'ai survécus mais qu'ai-je abandonné dans cette forêt ? Quelle part de moi est restée là-bas, dans l'herbe souillée de sang au nom d'un dieu qui ne représente rien pour moi?
Que sont les dieux pour se repaître ainsi de la chair et de l'âme des vivants?
Sont-ils envieux ? Sont-ils donc si insignifiants sans nous ? Nous qui pensons dépendre de leur bon vouloir, n'est-ce pas eux qui ont besoin de notre regard adorateur pour exister ?
Et sans ce regard, ne sombrent-ils pas dans l'oubli et la désuétude?

L'ombre d'un soleil noir s'est étendue sur ma vie et je sais que rien ne sera plus jamais pareil à présent.
Jamais plus.

Combien de temps prend une âme pour guérir ?
Lorsque toute trace de souffrance physique a été effacée... Combien de temps met un coeur à repartir normalement ?

J'ai beau étudier mon corps sous toutes les coutures, je ne vois rien.
J'ai beau m'abrutir de lecture, mes yeux ne voient que des symboles dénués de sens...
La nourriture n'est que cendres et poussière. Seule l'eau me rassasis.

Je n'ai pas revu le ciel. Le jour et la nuit se succèdent sans troubler mon errance dans cette chambre isolée.
Les cauchemars sont omniprésents, presque plus réels que la réalité.
Revivre l'agonie chaque fois que l'épuisement me plonge dans le sommeil, est un exercice épuisant qui sappe mes forces.

Est-ce toi qui te penche au-dessus du lit de la condamnée pour poser ta main fraiche et rassurante sur son front enfievré ?
Non. C'est lui qui vient silencieusement et qui me veille sans bruit. Il apporte le calme avec lui, la quiétude et le parfum de sa présence.

Si seulement je pouvais puiser en lui la force de franchir la porte de la prison où je me suis emmurée.

J'ai rêvé de l'Ensorceleur il y a peu. Il riait de moi, paré de son plus bel habit, magnifique et décadent.
Il riait de ma faiblesse et m'intimait l'ordre de le rejoindre sans plus attendre.
Je me levais, ma toilette luxueuse émit un froissement satiné. Marlan, le mage d'instinct m'offrait son bras pour me mener vers la lumière et les rires, vers la musique et la rumeur de la vie tout autour de nous.
Tout était à sa place dans l'ordre des choses, la danse m'enivrait plus encore qu'une liqueur, je virevoltais comme jamais, distribuant sourires et oeillades charmantes.
Mais la musique se muait lentement en une plainte discordante, les rires n'étaient plus que des aboiements de bêtes furieuses, de la lumière des lustres émanait une vapeur sanguinolente et méphitique.
Marlan et l'ensorceleur n'étaient plus que des spectres grimaçants prêts à se repaître de ma terreur.
Inutile de se débattre, le sol se dérobait sous mes pieds et je chutais lentement sans fin, perdant toute constance à mesure que le vent furieux dévorait mon être de sa caresse cinglante.

Je m'éveillais meurtrie et hébétée.
Je rejetais mollement les couvertures loin de moi et restais assise là, au bord de ma couche.
Mes viscères s'étalaient sur mes cuisses comme autant de dentelles macabres et luisantes, d'une sombre beauté.
Je fermais les yeux avec force pour chasser cette vision, le coeur au bord des lèvres, le souffle court et rauque.
Lorsque je les rouvris l'horreur accueillie ma vision, un immense soleil au visage ricanant s'étalait sur toute la longueur du mur opposé, tracé dans le sang, sans doute le mien.
Je hurlais à m'écorcher la gorge et m'éveillais en sueur dans les draps... Entière, saine et sauve.

Ces rêves m'empêchent encore de reprendre le dessus.
Puisses-tu joindre tes forces à celle de mon ange gardien afin de m'arracher à ces ténèbres.

Je m'avance fièrement dans la lumière.

Tous les événements vécut depuis ma naissance devaient me mener sur ce sentier glorieux.
Si rien n'est le fait du hasard, alors c'était là ma voie, ma destinée.
J'ai besoin de le croire, je dois trouver un sens à ma vie et cette perspective là me convient.

Je désire me libérer pour m'offrir au monde.
Le deuil n'était qu'une excuse pour continuer à nier ma nature véritable.
Je sais que tu le réprouve, je sais que tu répugnes à me voir prostrée dans la prison que je me suis façonnée.

Si tu subsiste quelque part ailleurs que dans ma psychée alors je sais que ton existence est grandiose.
J'aimerais me baigner dans ta lumière mais l'heure n'est pas encore venue et je dois vivre.
J'ai jusqu'à présent survécus à ton absence, survécus aux nombreuses épreuves qui ont jallonnées ma route, mais si chaque jour est un pas de plus vers toi... alors, je veux vivre intensément, sans regrets, sans remords.

L'enfant en moi est morte.
Elle a été sacrifiée sur l'autel de leur démence.

Mon astre veille sur moi, nuit et jour... Sans jamais faillir à la tâche de guérir mon âme meutrie.
Mais il sait que je dois trouver en moi même la force de me relever.
C'est en affrontant ma peur que je pourrais la jugguler.
Si l'on apprend dans la souffrance alors je veux souffrir encore et encore, mourir et renaitre autant de fois qu'il le faudra pour être enfin plus qu'une femme ou une mage, mais l'artisan de ma propre destinée.

Je m'avance fièrement dans la lumière de ce jour nouveau, plein de promesses et de mystères, libre.

Nous portons tous des masques, nous maquillons nos visages pour paraitre plus plaisants ou plus laids.
Derrière chaque masque se cachent des intentions. Nous sommes fait d'intentions...

Je me suis penchée au-dessus de l'eau pour me raffraîchir après l'entrainement et j'y ai vu un masque fait de sang et de poussière et au-delà de toutes ces couches repoussantes j'ai vu mon regard...
Un regard que je ne pourrais jamais porté sur toi ou sur lui, un regard encore tout emplit de la frénésie, de l'exaltation que me procurent ces excursions nocturnes.

Des promesses ont été faites, avant tout à moi. Comment pourrais-je me trahir moi-même?

Qu'il est grisant d'apprendre à jouer de ce pouvoir, de le modeler selon ma volonté, il est l'extension de mon bras, de ma volonté...

Et lorsque l'épuisement semble le tarir, j'ai appris à le remplacer par la sensation de ma lame tranchant à vif dans les chairs, faisant jaillir ce flot carmin que je désire voir s'écouler dans la boue.

Je ne sais d'où est née cette envie irraisonnée de les souiller en plus de les abattre.
Sans doute un bas instinct de vengeance, ou peut-etre pire encore... Le sentiment purement humain d'imposer sa volonté, d'écraser par sa puissance, de soumettre à son désir celui qui lui semble faible et inférieur.

Peu importe la raison en vérité, je me vautre dans le sang et j'aime ça.
Celà passera, celà doit passer.
Que penserais-tu de moi alors que je m'acharne à les déposseder de leur tête? Pourquoi la tête me diras-tu? Je pourrais bien prélever une oreille ou une dent....
Non... la tête a une grande signification pour moi, ils ont beau n'être que des kobolds ils possèdent une intelligence, une conscience que je m'approprie.

Je ne te dirais pas où je les caches, tu gâcherais la surprise !

J'ai promis de devenir meilleure, j'ai promis de me battre et de ne plus jamais, ô grand jamais être la proie de quiconque.

Et si le papillon est tâché de sang en se libérant de sa chrysalide celà n'a aucune importance, un battement de ses ailes majestueuses suffira à disperser la souillure aux quatres vents.

Comme il est aisé de se fourvoyer, surtout sur soi-même et sur ses motivations.
Mon coeur meurtri était-il donc si aisément corruptible ?

La peur de subir encore, de mettre en péril la vie de ceux qui toujours s'évertuent à se trouver entre moi et le danger, cette soif de vengeance... malsaine.
Tout autant de motifs qui m'ont conduite sur une pente dangereuse.

Ils avaient tous raison à leur façon et je sais à présent que je peux réaliser ce rêve de controler ma destinée sans y sacrifier mon intégrité.

C'est donc, forte de cette vérité que j'ai livré aux flammes de la torche purificatrice, les vestiges de ma chasse, mes trophées.
Tout s'est consumé dans le feu, il n'en reste que des cendres à présent. Et le poids de ce sombre secret ne pèse plus sur mon coeur, il s'est envolé en même temps que la fumée grasse, noire et puante.
Mon coeur se serre en pensant que la Bête ne comprendrait pas. L'idée de son mépris me laçère comme une griffe impitoyable...
Le besoin de percer le mystère de son identité réelle, de partager ses secrets et de comprendre enfin la voie du chasseur, ne m'a pas quitté ; mais le sacrifice que je dois offrir en échange, je ne suis pas prête à le lui céder. Jamais...
Cependant, je suis consciente de ce qu'il m'a apporté et je lui dois beaucoup. Une intime compréhension de la louve qui sommeille en moi et la certitude de pouvoir la laisser s'éveiller si j'en éprouve l'envie.

Alors que je me tenais face aux flammes, j'ai sentis ta présence m'envelopper comme un vent tiède.
Si tu savais comme je suis soulagée.
Lorsque le meurtrier nocturne a tenté de m'assassiner, rien ne m'a laissé présager son attaque. Aucun signe, rien.

Celà me conforte dans l'idée que tu désapprouve cette voie que j'avais choisie de suivre.
La déception pourrait-elle te pousser à m'abandonner à jamais? Toi qui m'accompagne dans toutes mes errances...

La vie est une farce et nous sommes tous acteurs de cette pièce burlesque.

J'ai fais la connaissance d'une créature étrange et déroutante.
Elle a su mettre à nu mes sentiments et se joue de moi comme d'un instrument bien accordé.
Elle sait m'inspirer tour à tour le mépris, la jalousie, la colère et l'euphorie.
Je déteste celà, se voir confronter à ses pires défauts sans préavis... C'est déloyal.
Mais pourtant nécessaire pour se remettre en question.

Mon Astre semble la connaitre et l'apprécier à sa juste valeur et il n'est pas le seul.
Et pour tout t'avouer elle me séduit aussi.
Elle te plairait beaucoup et son dieu plus encore, "Erevan de Divin Farceur" , toi pour qui la vie est une Cabriole éternelle...

J'ai rêvé de gloire il y a peu, de gloire et de légendes.
Les cauchemars se tarissent lentement et laissent place à des songes plus doux.

L'avenir est un mystère, d'innombrables sentiers me mènent à lui, offrant chacun tant de possibilités que j'en ai le tournis.

Le continent d'Everneige n'est pas aussi paisible que ce que j'avais imaginé en débarquant sur ses côtes enneigées.
Il est agité de drames, de luttes intestines, de violence et de peur.
J'ai peur de ce qui arrivera demain, où que se porte mon regard je n'entrevoit que tumulte et orage et même si l'espoir subsiste, même si nombreux sont les braves qui tentent de préserver l'équilibre et le bien...
Je suis tentée de me cacher, de disparaitre dans un trou et de n'en ressortir que lorsqu'un semblant de paix règnera enfin sur le continent, mais qu'en est-il de la justice? Qu'en est-il des valeurs que nous partagions tous les deux?
Que penserais-tu de moi si je gâchais tout? Si ma faiblesse me conduisait à ma perte, qui restera ici bas pour se souvenir de toi?

Je ne puis continuer à exister dans l'ombre de ceux que j'aime. Je ne peux me résoudre à être un fardeau qu'ils trainent partout avec eux, entravés par l'angoisse de me voir succomber à quelques dangers...

Je deviendrais forte. Je dois devenir forte.

Se connaître soi-même... Accepter ses qualités et ses défauts... Je pense que ce sont de bonnes bases si l'on aspire à la paix intérieure.

Cette connaissance intime me faisait douloureusement défaut jusqu'alors, avant qu'il ne m'annonce qu'une épreuve décisive allait débuter.

Le Rituel de l'Appel.

Cette étrange cérémonie nécessitait une profonde méditation, il m'a fallu me tourner vers moi-même dans un état proche de la transe, et contempler avec un regard vierge ce que je fus, ce que je suis et l'ébauche de ce que je serais, peut-être...
Tout celà dans le but d'extraire de l'ombre ce fragment de mon âme, mon famillier.

Ô combien fut douloureuse cette introspection, si tu savais...

Derrière le voile ténu de mes paupières se tissait la trame cristalline de mes souvenirs, je m'y suis vite sentie engluée, piégée, encerclée de toutes parts par des visions de celle que j'ai été à tous les stades de mon dévelloppement.
Des scènes de joie, de doute, d'amour, de peur, de colère, de gloire... Ai je réellement été toutes ces femmes dévoilées?

L'inflexion masculine et apaisante de sa voix dirigeait ma barque sur les eaux sombres et périlleuses des souvenirs passés.
Cédant à sa volonté, j'ai fusionnées toutes ces femmes en une seule et même entité, mais je n'osais soutenir son regard magnétique.
Elle m'a alors imposée sa voix inflexible et impérilleuse, occultant tout autre son, jusqu'à la voix de mon guide.

Spoiler:

Je crois me souvenir avoir pleuré, je te l'avoues sans honte et ces larmes brulantes ont emportées avec elles mes doutes et mes frayeurs d'enfant.

Un rugissement s'est mit à enfler dans le secret de mon âme et je sais que c'est "elle" qui rugissait.
Elle m'est apparue alors, transformée, créature féline à la robe d'ébène. Son regard d'ambre impassible fixé sur moi... Et j'ai su.

"Viens à moi représentation de mon être, entends mon appel ! Viens à moi... Yin."

J'ai laissé sa présence animale m'envelopper comme un manteau de nuit velouté, une douce frénésie pareille à celle de la chasse m'a envahie lorsqu'elle a bondit sur moi, à travers moi, hors de moi pour se dévoiler aux regards dans un rugissement triomphal.

Vidée de toute énergie, je l'avais donc arrachée aux ténèbres de l'inconscience, cette part de mon âme à présent lovée contre mon corps vacillant... Bien réelle.

Il a posé sur moi un regard emplit de fierté et j'ai su que j'avais comblées ses espérances.
Quant à la représentation de mon âme, elle ne l'effrayait nullement, il semblait au contraire agréablement surpris.

A présent que le mystère de l'Appel m'a été révelé, je ne puis m'empêcher d'imaginer à quoi peuvent ressembler les familliers des autres arcanistes.

Dévoile moi ce fragment de ton âme et je saurais alors, qui tu es.

"Pourquoi ne parviens-tu pas à m'aimer?"

Ces mots sont tombés comme une accusation, une sentence et j'ai cru sentir le sol se dérober sous mes pieds.
J'ai souhaité être avalée par les abîmes. La damnation plutôt que sa souffrance. Car j'ai liée ma destinée à la sienne et que dès lors je veille sur son coeur. C'est mon trésor le plus précieux.

Pourquoi? Cette interrogation qui revient sans cesse, ce leitmotiv qui donne un sens à cette farce qu'est la vie, qu'est ma vie...

J'éprouve ce besoin vital de tout savoir, de tout comprendre et pourtant je ne parviens qu'à effleurer la surface des choses.
Il est mon Astre et je ne parviens qu'à effleurer son mystère, le mystère de sa froideur entrecoupée de brefs rayonnement de chaleur. Il est comme une statue à qui j'administre baisers et caresses dans l'espoir de l'éveiller à la vie.

Je l'aime.

Penses-tu que je suis puérile? Une enfant gâtée à qui l'affection a toujours été prodiguée sans contrepartie...
Je n'ai jamais eu à donner auparavant et il se pourrait que celà m'effraie de me donner toute entière à lui.
Tu sais à présent, comme moi et comme toute personne raisonnable que cet amour ne le mènera nulle part.
Ne suis-je destinée qu'à ce rôle éphemère? Ma condition me répugne ! Et pourtant, je sais que je boirais la coupe jusqu'à la lie. Je veux l'aimer au-delà de toute mesure, même si celà ne peut durer qu'un temps, le temps de ma vie... mortelle.

Je l'aime.

Je n'ose m'étendre plus avant sur le sujet, même dans ces pages qui n'appartiennent qu'à nous.
J'ai peur d'extirper de mon inconscient des raisonnements dérangeants, des plaintes et le découragement face à l'inéluctable.

Un éminent représentant du Beau Peuple a croisé mon chemin. Un Prince d'Eternelle Rencontre, la terre éternelle et merveilleuse des elfes.
Son chant irréel a envahit mon mon âme, d'une complainte poignante et déroutante qui m'a brisé le coeur.
Les elfes sont, sans doute, ce qu'il y a de plus beau en ce monde exceptée la nature qu'ils préservent.
Le rayonnement de ces êtres me blesse.
Ils sont le mystère que je ne percerais jamais. Celui que je désire ardemment.
Mais le temps me fait défaut et rien ni personne ne pourra jamais changer celà.
Pas même toi...

Pourquoi tes rêves comptaient-ils plus que moi?
Pourquoi l'accomplissement de ton destin exigeait-il une telle déchirure?
Pourquoi ne puis-je accepter ta disparition?
Pourquoi ne puis-je me pardonner de t'avoir perdu?
Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?

La peur de le voir s'enfuir loin de moi m'empêche d'avancer.
La peur de souffrir une nouvelle déchirure m'empêche de me lier totalement à lui.
Et ce cercle vicieux m'enserre le coeur tel un étau impitoyable.

Je peux assurer au moins une chose : pour la première fois depuis notre tragique séparation, j'en viens à te haïr d'avoir dévasté mon être.

Les temps sont troublés, toutes mes certitudes volent en éclat et je rêve de paix sous la clameur d'un ciel couleur de sang.
As-tu jamais éprouvé ce sentiment déroutant de ne voir en l'autre qu'un ennemi potentiel, un obstacle de plus sur ton chemin?
Tous autant de spectres qui s'agitent, animés de desseins sombres et futiles.

Le destin de ce continent se joue en ce moment, sous nos yeux et... je n'éprouve rien.
Retranchée à l'intérieur de moi-même, j'attends que l'orage passe ou que le néant nous engloutisse tous.
Les tourments de mon coeur entretiennent bien assez, à eux seuls, mon mal être et c'est avec un plaisir sinistre que j'aime à contempler ces autres, qui s'improvisent héros, s'enliser dans leur propre bourbier.

Monstre dévoreur de monde, vampires, pègres, conflit entre cités, cultes maléfiques, Gobelins enragés, Justice bafouée, Milice corrompue, Tyrannie...

Il y a bien là de quoi écrire un ouvrage à succès ! Mais il y a en ces terres des plumes bien plus habiles que la mienne qui coucheront sur le papier les mémoires de ces terres.

Qui connait la portée réelle de ces actes? Quel en sera l'impact dans les décennies à venir.

J'aime à m'imaginer désertant mon corps afin de n'être plus qu'une conscience contemplative.
Je pourrais jouir alors du privilège de constater de l'évolution du monde, sans contrainte, sans remord, sans attache physique.
Libre d'observer et d'apprendre sans jamais faillir.
Qu'il serait bon de ne plus rien éprouver... ni peine, ni joie.
Qu'il serait reposant de ne plus rien sentir... ni souffrance, ni plaisir.

Mais que deviendrais-je alors ? Serais-je encore humaine ? Serais-je encore vivante ? Serais-je encore ? Tout simplement...

Le corps est l'école où l'âme apprend à voler, mûre de toutes les expériences qui auront traversée sa dépouille mortelle...
Est-ce ainsi pour toutes créatures de ce monde?

Si tu existe encore, quelque part... Je m'interroge sur les causes que tu as choisis de défendre.

Tu ne saurais exister sans but n'est-ce pas ?

A mon étoile.

Tu as longtemps illuminé ma vie, nous connaissions l'amour avant même de pouvoir le nommer.
Tu es ma symphonie d'amour, tu es tout.
Tu es la moitié de mon âme, tu es ce joyau qui alimente mon coeur,

Mes pensées dérivent au hasard des souvenirs,
Fantôme d'un bonheur qui semblait trop parfait,
Dans les heures les plus sombres je me suis surprise à songer que peut-etre tu n'avais jamais existé...
Ai-je rêvé ta présence? N'es tu que le fruit de mes songes, le fruit le plus doux et le plus sublime.

Cent fois j'ai désiré pouvoir remonter le court du temps et offrir ma vie,
Cent fois j'ai désiré retourner à la terre et que de cette offrande, la vie te sois rendue.
Je n'ai pas pu.
Je n'ai pas pu, car j'avais alors espoir de te retrouver, et ce fol espoir ne m'a pas quitté.
Mais je te dois la liberté. Je te dois au moins la paix.

Envole toi sans un regard en arrière, élève toi jusqu'à te fondre en lumière
La voûte est ton berceau, elle t'appartient.
Vas. Dans ce lieu où la souffrance est absente... Je te rejoindrais bientôt.
Je n'ai plus peur d'une vie vide de toi car je sais à présent que jamais tu ne m'as quittée.

Reçois mon chant d'amour, il n'est tissé que de ta lumière.
Tu es mon bien céleste.
Veille sur ma vie, elle est tienne également...

Vole mon amour, vers notre firmament.

As-tu jamais éprouvé ce frisson céleste? Cette perdition de soi dans l'être aimé?
C'est une jouissance infinie que d'aimer, mais rien ne m'avais préparée à ce déferlement de sensations plus intenses les une que les autres.

Ecoute le chant de mon âme qui s'élève aux nuées pour t'offrir la candeur de ma voix extasiée.
Les étoiles se sont elles penchées sur l'alcôve du plaisir pour lécher le miel de notre passion?

L'ai-je conquis ou est-ce lui qui planta sa bannière sur les rivages vierges de mon être? Mon elfe, mon Astre... mon mystère.
Comme j'aimerais te décrire chaque caresse, chaque frisson ! Mais je tremble à l'idée de replonger au coeur de ce brasier où mon âme fut consumée pour renaitre plus belle... Oh si tu savais...

Décrire l'indescriptible, deux corps qui se jettent l'un contre l'autre et s'étreignent dans une douce fureur et un abandon sans limite.
J'ai peur tu sais.
J'ai peur que demain rien n'ai changé hormis moi-même.
J'ai peur que cette alchimie complexe, cette extase de l'âme à travers la chair, ne suffise pas à guérir mon coeur.

Je ne me voilerais plus la face. Tu connais les méandres tortueux de ma pensée.
Il ne peut m'aimer totalement, jamais... Je le sais, chaque fibre de mon être le sait et je ne puis tolérer de n'être aimée qu'à moitié.
Moitié moins que qui ? Et au nom de quoi ?

Je l'aime... Et je le hais.

Et dans la brève fusion des corps, que célebrons nous... Est-ce là une union ou une séparation?

Comment discerner le bien du mal sur notre chemin ?
Comment savoir ce qui nous attend au détour d'un virage ?
L'enfer est pavé de bonnes intentions.
Cette leçon est cuisante, parce qu'emplie de cruelles vérités.

Pourquoi chacune de mes actions me porte t-elle toujours préjudice?
Ma naïveté? Mon karma? Les deux liés me jettent souvent dans la gueule du loup et que puis-je faire alors sinon pleurer mes erreurs et me confondre en remords pour mieux... recommencer?

Oh ne ris pas ! Je souffres tu sais !
Je sais ce que tu penses, mais qu'y puis-je?

En m'obstinant à rapprocher ces deux êtres qui me sont chers entre tous... N'ai-je pas agis pour le Bien de tous?
Ils sont pour moi comme des Inséparables, ce couple d'oiseaux majestueux qui ne peuvent survivre l'un sans l'autre.
Si l'un des deux vient à mourir, l'autre se laisse déperir ou s'offre à la mort, incapable de concevoir l'existence sans sa moitié.
Croire en la pureté de leur Amour m'offrait une vision féerique de mon avenir auprès de mon Astre.

Et si j'avais tort? Et si l'amour était plus complexe que la vision que j'en ai ? Ou plus simple... si cruellement simple, tout bonnement.
Et si l'on pouvait aimer, souffrir, guérir et aimer de nouveau?
Cette image me déplait. Elle ne flatte pas mes chimères romantiques...
Mais elle semble tellement plus proche de la réalité.

L'égarement des uns, apportent aux autres une compréhension plus claire.
L'égarement des uns, infligent aux autres une blessure plus grande, béante.

Aide moi...

Je n'ai plus de frère, il s'est renié dans l'ivresse. Son coeur est torturé et dérive au hasard.
L'amour qu'il éprouvait avec tant de passion s'est-il réellement usé au point de disparaitre?
Je ne peux y croire !

Mon Astre avait raison, sentinelle de mes pensées, n'avait-il pas déclaré qu'il ne saurait y avoir de lien fraternel?
Et pourtant j'ai appris à aimer cet être tourmenté, comme s'il était de mon sang, et plus encore...
Je veux le guider sur le chemin du pardon, je veux le voir renouer avec cet amour car je suis persuadée que c'est son destin que de rendre cette femme heureuse.

Et pourtant... Je ne vois que doute, amertume, incompréhension et au coeur de la tourmente, un être innocent à venir.

Qui est bourreau, qui est victime? Je voudrais que tout redevienne comme avant et pourtant le doute s'immisce en moi...
Meurtrie d'avoir étreint la lame qui ne pouvait que me lacérer, d'avoir caressée la flamme qui ne pouvait que me bruler...

Accorde moi un peu de ta grâce, apporte moi la paix et la clémence...

Quand mon coeur suinte de doute et de douleur, n'est-il pas là pour panser mes plaies?
N'est-il pas l'oreille patiente et sage dans laquelle je déverse le flot intarissable de mes frayeurs inavouables?

Et malgré sa folle trahison, n'est-il pas toujours le même?
Telle que j'étais, je suis restée... Je l'aime.

Enormément de temps a passé depuis ma dernière confession.

Je n'avais pas le coeur à relater tous les événements bons ou mauvais qui se sont déroulés depuis.
Je sais que tu m'attends et je sais déjà que tu me pardonneras.

Tous ces visages connus et inconnus, toutes ces vies qui se croisent, se mêlent et se quittent pour disparaitre invariablement dans le néant de l'oubli.

Comme il m'épuise ce ballet incessant, comme il me charme et m'ennuie tout autant.
Et je reste là au milieu de ce tourbillon de couleurs, indécise et perdue, incapable de retrouver le chemin de mon âme.
Egarée entre ciel et terre, je te cherche encore.
C'est dans la confusion que je retrouve cette sensation de ta présence fantasmée ou non, révelée par le danger qui me courtise sans relâche.

Ma frénésie ne trouve nul exhutoire, j'enferme la rage en moi même afin qu'elle me dévore sans nuire à quiconque.
Mon seul but est l'oblitération totale de moi même. J'ai besoin de souffrir pour me sentir vivante.
J'ai besoin de me sentir mourir pour jouir de la renaissance.
Je recherche le frisson de la peur pour tromper l'inertie de mon existence.
Mon coeur a soif de la Chasse, mais en vertu de quoi, d'autres devraient ils souffrir du poids de mes erreurs?
Egoïsme. Vanité que de se complaire dans la déchéance sans égard pour ceux aux yeux de qui vous comptez... Ceux qui ont foi en vous.

L'Astre de ma vie se laisse engloutir doucement par les ténèbres qui envahissent mon âme et mon coeur. Il s'y fond sans se débattre et je ne peux que contempler la déchéance de cet amour.
A quoi bon hurler? A quoi bon l'entrainer dans une valse macabre? A quoi bon danser sur les cendres encore fumantes? Celà raviverait il la flamme autrefois si incandescente?

Les chaînes qui m'entravent le coeur, m'empêchent d'aller de l'avant.
Ces chaînes m'appartiennent, c'est moi qui les ai conçues, c'est moi qui les ai désirées...
Malgré sa sagesse, malgré son amour. Comment pouvait il me convaincre d'exister par moi même et non à travers lui?

Tout celà, je le comprends aujourd'hui. Mieux, je l'accepte et je m'y plierais.

L'Ensorceleur est venu à moi comme un mauvais présage.
Personnification de tout ce qui m'effraie en moi-même, tout ce que je réprouve et désire à la fois.
La Toile a chanté sa sombre mélopée à son apparition et la sorcière en moi s'est mise à chanter en diapason.
Comme j'ai recherché alors la protection des miens, mais la froideur de leur absence m'a paralysée.
Cependant, tous ces regards ! Toutes ses mains tendues prêtes à combattre si je faiblissais, prêtes à me relever si je chutais.
Comment leur témoigner mon admiration et ma reconnaissance? Comment m'acquitter de cette dette?

Grandir. Apprendre à se défendre par ses propres moyens. Ne plus rester tétanisée comme une enfant face à la terreur indicible de se voir assimilée par une entité ô combien plus puissante que soi.

Combien de vies devrais-je encore mettre en danger à cause de ma lâcheté?
Combien cette faiblesse est méprisable.
Je ne fuirais plus. J'irais de l'avant. Telle sera ma quête. L'accomplissement de soi...

Quel est ce soupir chagrin? S'évade t-il de tes lèvres ou des miennes?
Tu sais où mes pas vont me mener, tu sais où je vais trouver refuge.
C'est peut-être là une page qui se tourne, un nouveau chapitre de notre histoire.
Mon amour. Laisse moi le nommer pour toi...

Décadence.

La Reine des Liennes a encore frappé.

La lumière a en partie été faite sur cette hideuse créature à l'intelligence effroyable.
Création contre nature de déments, elle avait été envoyée sur notre plan plus d'une centaine d'années auparavant, dans le but d'éradiquer toutes formes de vie.
Elle ne s'attendait pas alors à rencontrer la résistance d'un ordre de paladins, de chevaliers et de prêtres, prêts à sacrifier leurs vies pour éradiquer cette menace.
L'Ordre Flamboyant.

C'est avec une pensée émue que j'imagine cet acte de bravoure désesperé.
Comme la Foi peut pousser à accomplir de grandes choses ! Tout comme l'Amour...

Malheureusement ce sacrifice n'a pas suffit à faire disparaitre cette monstrueuse créature et nous voilà, une bonne centaine d'années plus tard, à la traquer dans ces tunnels sordides.

Elle a fait de nombreuses victimes avant qu'une expédition digne de ce nom parte en quête de sa tanière afin de la vaincre une bonne fois pour toute.
Sa dernière victime étant bien trop précieuse pour que les aventuriers ferment les yeux...
Sa dernière victime m'était bien trop précieuse pour que je ne m'enfonce pas dans cet enfer dans l'espoir de la ramener saine et sauve.

Je les observe tous drapés dans leur détermination et leur courage, des visages inconnus, mais aussi des visages connus et aimés qui savent d'un regard me redonner force et volonté.

Je me surprends à songer que certains manquent à l'appel, je me surprends à désirer le soutien inesperé de l'être que je redoute entre tous.

Je m'enfonce dans les ténèbres, la puanteur des cadavres est suffoquante...
Rien ne m'avait préparée à l'horreur indicible, rien.

L'angoisse est comme un étau qui vous serre le coeur.

Tandis que nous cheminons à travers les terres de l'horreur et de l'insondable danger, l'angoisse m'étreint.
Elle est comme une symphonie de malheur et de souffrance qui s'élève tout au fond de mon être et enfle, enfle, jusqu'à exploser...

Ma peur de le perdre atteint son paroxysme.
Autrefois cette peur n'avait pas de consistance, pas de visage, elle n'était que le fruit avarié de mon manque de confiance...
Et aujourd'hui que sa vie est réellement en danger. Je la ressens pleinement, elle coule dans mes veines comme un poison glaçial, menaçant de plonger mon corps tremblant dans une profonde paralysie.

Elvawen me donne du courage, elle est la clef de sa survie.
Tant qu'elle existe... mon Astre ne peut disparaitre.
Jamais elle ne permettrait que cet homme disparaisse, jamais sans tout tenter !
Elle endure tous les maux, toutes les peines et les brave en gardant cet air digne qui ne la quitte jamais.
Elle est forte, ô combien.

Tous l'ont été. Tous se sont alliés pour nous le ramener en vie.
Sa mort impliquait trop de monde, sa mort menaçait les chances de survie de notre monde face à la menace, toujours plus palpable, de Légion.

Quant à Elvawen et moi, l'idée de sa mort nous était intolérable pour une toute autre raison.

Imagines tu cette fin terrible, souffrir de n'être que l'incubateur de cette monstruosité?
La sentir grandir en toi et te consommer avant de jaillir de ton être dans une gerbe de sang et de chair, t'ôtant la vie de la manière la plus affreuse et la plus laide qu'on puisse imaginer...

Comment une telle aberration a t-elle pu naitre? De quel esprit malade a t-elle été extirpée?
Même abandonnée de ses Maîtres elle a continué à se reproduire, esclave d'un impérieux instinct de survie.
L'idée que nous lui sommes similaires me trouble et dérange ma quiétude.
Nous sommes animés par ce même instinct, nos appétits insatiables nous poussent même parfois à nous nourir de nos propres frères...
Combien de larves avons nous implanté dans le corps ou l'esprit d'autrui?

Quoiqu'il en soit... La Reine des liennes a été renvoyée d'où elle était venue, par le biais d'un étrange Rituel.
Un Rituel de Bannissement selon les dires de Marlan, dont l'intelligence nous a encore une fois permit de sauver la situation, aussi périlleuse soit-elle.
La créature abjecte s'en est donc allée assouvir sa vengeance contre ses anciens Maîtres.
Peut-être un jour, serons nous assez forts pour nous affranchir de nos dieux.
Peut-être...

Oh tu peux sourire !
Le dénouement de cette aventure fut heureux. Edailô est sain et sauf et la larve qu'il abritait lui a été ôtée sans souffrances superflues grâce à la clémence de la Reine des Liennes.
Tous peuvent être fiers de leur bravoure et cette capacité à faire fi des dissensions dans un intérêt commun.

L'avenir me semble radieux. Le dévoreur de monde n'a aucune chance face à la cohésion de nos forces.

Qui eut cru que l'espoir renaitrait d'un pacte de coeur, un serment solennel prononcé à la faveur de la nuit.

Le temps de l'errance est révolu. Une chance m'a été offerte, un but, un espoir.

Cette âme si semblable à la mienne, cette âme qui m'empêche de me perdre totalement.
De celles qui chaque fois me rapellent à la raison par leur chant mirifique...

Mon amour est incommensurable parce qu'elle est mon âme soeur.
Je peux m'évader, voleter en tous sens, en tous lieux.. mes pas me ramènent invariablement dans son sillage scintillant, tumultueux.

J'aimerais chanter une ôde à sa grandeur, que tous caressent enfin le mirage sublime des rivages de son esprit.
Mais je ne suis pas poète, je ne connais ni les mots, ni l'art de les glorifier.
Le seul chant qui s'élève est celui de mon coeur. Il s'élève et caresse son étrange parure, de lumière et de noirceur entremêlées.

Une frénésie plus douce, un enthousiasme sans bornes me portent vers les nuées auxquelles j'aspire.
Je désire percer les mystères qui m'échappent, faire voler en éclat cette illusion qu'est la vie telle que je la perçois.

Il sera mon guide dans cette folle entreprise.

Et que cette mise à nue révèle enfin la beauté, la pureté originelle.

» Du beaume au coeur
» [Anime à reprendre] Final coeur libre